L'homme de plein vent
Pierre Meunier et Hervé Pierre
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Deux hommes comme seuls Beckett pouvait en produire, Vladimir et Estragon qui attendent Dieu bien sûr, mais surtout Clov et Hamm qui attendent la fin, tant l’un semble assujetti à l’autre, tant l’un est aveugle quand l’autre serait sourd. Car il y a bien une hiérarchie entre ces deux hommes. L’un manipule les objets pour alimenter les rêveries de l’autre, tant l’un a un corps et des désirs quand l’autre se nourrit d’air. Et nous sommes plongés dans un hors temps, comme un enfer propre à Sisyphe où tout pourrait se répéter à l’infini, sans début, sans fin, sans histoire. Et cette absence d’histoire qu’on retrouve encore chez Beckett autorise l’absurdité, la folie, l’humour, la poésie finalement. Poésie de deux hommes qui tentent d’éviter la fatalité de la chute, qui doivent traiter avec la folie des boulets, qui font danser les ressorts mangeurs de boulons comme les charmeurs de serpents sur la place Jemaa El Fna. Un spectacle terriblement touchant qu’on a la chance une fois n’est pas coutume de pouvoir revoir puisqu’il a été créé en 1996 et recréé en 2019.
Thomas Adam-Garnung